La vie à fleur d'objectif
Comme plusieurs femmes de sa génération, Ina Bandy a choisi la photographie pour rendre compte de sa vision du monde. Ida Gurevitsch a arpenté l’Europe secouée par les soubresauts de l’Histoire qui ébranlèrent le XXe siècle. Née à Tallin (Russie), en 1903, elle fuit les persécutions antisémites et s’installe finalement en France, terre d’accueil pour de nombreux photographes et deviendra une parisienne jusqu’à la fin de sa vie. Dès les années 1930, elle se fait connaître sous le nom d’Ina Bandy. Elle travaille en indépendante pour la presse, pour l’édition et dans l’immédiat après guerre pour des organismes et des institutions (l’Unesco, le Commissariat général au tourisme, les Archives nationales…). Elle réalise des reportages en noir et blanc, mais aussi en couleur, sur la vie quotidienne et plus particulièrement celle des gens modestes dont elle saisit la soif de vivre après les années de privation de l’Occupation.
Ina Bandy connaît un vrai succès en photographiant les enfants qu’ils soient à Paris ou rassemblés par l’association fondée par Robert Ardouvin à Vercheny (Drôme). Ce vaste reportage, au cœur de la France profonde, traduit les valeurs humanistes qui irriguent la photographie des années 1950. Liberté, insouciance, amour du grand air animent les gamins qu’elle saisit sur le vif. Si ses photographies documentent la vie sociale et sont un témoignage de première importance, Ina Bandy, en artiste, à l’image de Robert Doisneau, de Willy Ronis et de Sabine Weiss, porte un regard empreint d’une sensibilité à fleur d’objectif. D’un naturel solitaire, elle meurt presque oubliée et son œuvre est dispersée.
Cette exposition marque le retour d’Ina Bandy sur la scène photographique et inaugure un nouveau cycle de recherches sur son œuvre mené conjointement par ses héritiers et par les historiens.
Françoise Denoyelle
Professeur des Universités
2013